Huit échanges-clés d'Alexis Kohler avec les juges d'instruction
Voici une sélection de déclarations d’Alexis Kohler fin septembre ayant conduit à sa mise en examen pour "prise illégale d’intérêt" et à son placement sous le statut de témoin assisté pour "trafic d'influence", selon des éléments de son interrogatoire obtenus par l’AFP.
- Lien familial -
Alexis Kohler évoque un lien "simple" mais au "cinquième degré" avec la famille Aponte, propriétaire de La Mediterranean Shipping Company (MSC), ainsi qu’une "amitié sincère" entre son épouse Sylvie et Rafaela Aponte (cofondatrice de la compagnie). Une relation matérialisée par plusieurs séjours, entre 2009 et 2019, de Sylvie Kohler ou des enfants Kohler sur des yachts de MSC, souvent avec des membres de la famille Aponte.
- Conflit d’intérêts ? -
Le secrétaire général de l’Elysée affirme n’avoir "jamais considéré être en situation de conflit d’intérêts". "Tout simplement parce que je n’avais pas d’intérêt et je n’avais pas vocation à en avoir, et que mon lien familial était éloigné", ajoute-t-il.
De manière paradoxale, Alexis Kohler va marteler avoir, par souci de "transparence", été "au-delà des obligations légales et déontologiques" en avertissant constamment sa "hiérarchie" de ces liens devenus selon lui "largement connus".
M. Kohler souligne qu’en tant qu’administrateur de STX France (désormais Chantiers de l'Atlantique) et du GPMH (Grand port maritime du Havre), il n’a "jamais rencontré MSC" ni "participé à des réunions" ni "pris de décisions de (son) propre chef" concernant le groupe.
Il assure avoir insisté pour ne plus être administrateur de STX, y restant car sa "hiérarchie (le lui) a systématiquement et explicitement demandé".
- Sa hiérarchie -
Les juges l’interrogent sur des déclarations de Jean-Dominique Comolli, patron de l’Agence des participations de l'Etat entre 2010 et 2012, qui concède à son sujet et à celui d'un autre haut responsable : "Au final, c'est surtout (nous-même) qui devrions être poursuivis, puisque c'est nous qui lui avons imposé de rester" administrateur de STX . "Finalement, il avait plus conscience du problème que nous".
Alexis Kohler lâche : "Rétrospectivement, il est vrai qu’il aurait été plus simple que je ne sois pas nommé administrateur pour éviter tout risque".
- Message à Alexa Aponte -
Le 20 novembre 2013, à la veille d’une réunion qualifiée d’"importante" par les juges entre MSC, qui envisage d'acheter deux navires à STX, et le ministre de l’Economie Pierre Moscovici, Alexis Kohler écrit à Alexa Aponte, en charge des finances de MSC : "Je ne serai évidemment pas à l'entretien pour éviter tout conflit d’intérêt et tout risque de problème avec cela pour la suite. Mais le ministre sait que nous sommes proches)".
Alexis Kohler commente : "Je ne fais que lui expliquer que la situation est parfaitement claire pour tout le monde, y compris le ministre".
- Les liens entre STX et MSC -
Alors que les liens entre MSC et STX apparaissent fortement imbriqués, le premier étant selon les juges "principal client" et candidat à la recapitalisation du second, Alexis Kohler explique n’avoir jamais cherché à se "déporter des questions relatives à STX dès lors qu’elles ne concernaient pas MSC".
- Notes internes -
"Si en tant que membre des cabinets" ministériels de Pierre Moscovici (2012-2014) et Emmanuel Macron (2014-2016) à Bercy, "votre déport bien que non formalisé était effectif, comment expliquez-vous que vous ayez persisté à recevoir toutes les notes de la Direction générale du Trésor ou de l’APE (…) ayant trait aux opérations entre STX et MSC ?", l'interrogent les juges.
"Le circuit des notes était totalement standardisé et ne répondait à aucune démarche de ma part", répond le secrétaire général de l’Elysée.
- Félicitations de Laurent Castaing -
Les juges évoquent deux mails du directeur général de STX France.
En mars 2014, après la signature d’un important projet de contrat entre MSC et STX, Laurent Castaing remercie Alexis Kohler, "superviseur discret".
En août 2016, après une réunion sur la recapitalisation de STX à laquelle candidatait un consortium avec MSC, il félicite M. Kohler pour ce dossier "intelligemment traité".
Ce dernier balaie des "relations inexistantes" avec M. Castaing.
- Un appel de MSC croisières ? -
Le 24 août 2016, deux jours avant une réunion entre le Premier ministre Manuel Valls et le ministre de l'Economie Emmanuel Macron, Alexa Aponte transmet à son mari et président de la branche croisières de MSC, Pierfrancesco Vago, le numéro de téléphone d’Alexis Kohler pour un appel une heure plus tard "précisément".
Alexis Kohler aurait participé à cette réunion préparatoire sur la recapitalisation de STX France, qui concerne aussi MSC.
Alexis Kohler répond aux juges : "Je ne crois pas leur avoir parlé".
F.M.Ferrentino--PV