Hommages au journaliste britannique et à l'expert brésilien assassinés il y a un an en Amazonie
Plusieurs commémorations sont organisées lundi au Royaume-Uni et au Brésil à la mémoire du journaliste britannique Dom Phillips et de l'expert brésilien Bruno Pereira, assassinés il y a un an alors qu'ils documentaient des crimes environnementaux dans la forêt amazonienne.
Des rassemblements sont prévus à Londres, Rio de Janeiro et Brasilia, mais également à Atalaia do Norte, dans la vallée de Javari, réserve indigène dans le nord du Brésil près des frontières colombienne et péruvienne, où ont été aperçus pour la dernière fois les deux hommes le 5 juin 2022.
Cet endroit reculé est un refuge pour les trafiquants de drogue, les orpailleurs illégaux et les braconniers.
Selon l'enquête, trois pêcheurs soupçonnés d'être liés à un réseau de trafiquants de drogue ont avoué avoir abattu les deux hommes, découpé leurs corps en morceaux et les avoir cachés dans la jungle, où les dépouilles ont été retrouvées après dix jours de recherches. Le cerveau présumé, Rubens Villar Coelho, un baron de la drogue soupçonné d'être impliqué dans le commerce illégal du poisson, a été arrêté en juillet puis placé en résidence surveillée.
"Nous n'abandonnerons pas cette lutte pour la planète et nous n'oublierons pas Dom Phillips et Bruno Pereira", a déclaré le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva dans un communiqué adressé au journal The Guardian, avec lequel M. Phillips collaborait.
Un documentaire retraçant la vie et le travail de Phillips et de Pereira, dont la disparition a suscité un tollé mondial, a été diffusé vendredi sur la plateforme vidéo brésilienne Globoplay.
Dom Phillips, 57 ans, journaliste de renom qui avait également publié dans le New York Times, le Washington Post et le Financial Times, travaillait sur l'écriture d'un livre intitulé "Comment sauver l'Amazonie".
Il accompagnait Bruno Pereira, 41 ans, haut fonctionnaire de la Fondation Nationale des peuples Indigènes, la FUNAI, qui avait pris un congé sans solde et travaillait comme consultant pour aider les groupes indigènes à protéger leurs terres contre la pêche ou l'orpaillage illégal, un engagement qui lui avait valu des menaces de mort.
Leur disparition avait déclenché un flot international de condamnations, du groupe de rock U2 à la star hollywoodienne Mark Ruffalo, en passant par la légende du football Pelé.
La veuve de M. Phillips, Alessandra Sampaio, a déclaré qu'elle avait été émue par la résonance de cette affaire.
"Ce qui a le plus de sens pour moi dans cette tragédie, c'est de comprendre qu'il s'agit en fait de quelque chose de plus grand. Cela a eu un tel impact", a déclaré Mme Sampaio, 52 ans, à l'AFP.
"J'ai même entendu beaucoup d'enfants dire qu'ils considéraient Dom et Bruno comme des héros de la forêt. Cela a sensibilisé les gens à l'Amazonie et à la gravité de la menace qui pèse sur elle, tant au Brésil qu'au niveau international".
- Le combat continue -
Des proches ont lancé une campagne de collecte de fonds pour permettre de terminer le livre entrepris par Dom Phillips, tandis que la plateforme journalistique Forbidden Stories parraine des projets de reportage pour poursuivent le travail des deux hommes.
Trois pêcheurs sont actuellement poursuivis pour ces meurtres, dont le cerveau présumé, un trafiquant de drogue soupçonné d'être impliqué dans le commerce illégal du poisson arrêté en juillet dernier.
La lutte pour la protection de l'Amazonie, forêt primaire clé dans la course à la lutte contre le changement climatique, a pris un nouvel élan au Brésil avec la victoire de Lula contre le président sortant d'extrême droite, Jair Bolsonaro.
"Nous nous battons pour relancer les politiques de protection des peuples indigènes et de l'Amazonie", a ajouté Lula dans son communiqué.
Mais il vient de subir un revers par le Parlement qui a retiré au ministère de l'Environnement ses compétences en matière de cadastre des terres rurales, levier essentiel pour combattre la déforestation. Le ministère des Peuples autochtones a lui perdu la responsabilité de la démarcation de nouvelles réserves indigènes.
Pendant ce temps, les menaces de mort et la violence restent monnaie courante dans la vallée de Javari. "Absolument rien n'a changé", a déclaré jeudi le dirigeant indigène Beto Marubo lors de la première du documentaire.
R.Lagomarsino--PV