La pollution des feux de forêt canadiens suffoque le nord-est des Etats-Unis
Les incendies au Canada ont continué jeudi de charrier leur fumée jusque dans le nord-est des Etats-Unis, un épisode de pollution atmosphérique rare qui touche plus d'une centaine de millions d'Américains et constitue "un rappel brutal des conséquences du changement climatique", selon Joe Biden.
Vols retardés pour cause de faible visibilité, événements en extérieur annulés, école à distance... L'épisode a des conséquences concrètes sur la vie des habitants.
Selon l'Agence américaine de protection de l'environnement, l'EPA, plus de 111 millions de personnes étaient concernées par des alertes à la qualité de l'air dans une vaste partie du nord-est des Etats-Unis.
La région est peu habituée à ce type de fumées, contrairement à l'Ouest américain.
Des feux importants sont survenus particulièrement tôt cette année au Québec, et leur fumée est poussée directement vers le sud en raison des conditions météo.
Un événement célébrant le mois des fiertés LGBT+ ("Pride Month"), qui devait se dérouler jeudi soir à la Maison Blanche en extérieur, a été reporté, tout comme un match de baseball professionnel.
- "Angoissante" -
L'inquiétude concerne surtout la santé des personnes fragiles, comme les enfants, les personnes âgées ou celles ayant des problèmes cardiaques ou respiratoires.
Les visites aux urgences liées à des crises d'asthme sont en hausse à New York, a indiqué un porte-parole du département en charge de la santé de la ville. Mais ces "quelques centaines" de patients ne débordent pas les services, a-t-il précisé.
D'impressionnantes images de New York plongée dans une lumière orangée ont circulé mercredi, bien que le ciel y soit plus clair jeudi.
"Je n'ai jamais vu quelque chose comme ça", a dit Linda Juliano, 65 ans, en acceptant l'un des millions de masques distribués aux New-Yorkais.
"Cela m'a beaucoup fait penser au 11-Septembre, de voir le ciel rempli de fumée", a-t-elle confié à l'AFP, jugeant la situation "angoissante".
Tout comme celui de Washington, les zoos du Bronx et de Central Park ont été fermés, et les élèves des écoles publiques de New York suivront leurs cours à distance vendredi.
Aux aéroports de New York (LaGuardia, Newark) ou encore de Philadelphie, les vols ont subi des retards liés à la faible visibilité, a fait savoir l'Agence de l'aviation civile, la FAA.
- "Théories du complot" -
Le réchauffement climatique exacerbe le risque d'incendie et leur intensité. L'augmentation de la température, la multiplication des canicules et la baisse des précipitations par endroits représentent une combinaison idéale pour leur développement.
Même si aucune étude évaluant le lien entre les feux actuels au Québec et le changement climatique n'a été encore conduite, "les conditions que nous voyons au Canada sont conformes aux avertissements des spécialistes du climat", a déclaré jeudi Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général de l'ONU.
Evoquant à la fois la fumée des incendies et une recrudescence des phénomènes d'inondation à travers les Etats-Unis, un porte-parole de la Maison Blanche, Andrew Bates, a fustigé l'opposition républicaine qui, selon lui, "adhère à des théories du complot démenties, niant l'existence et la nature du changement climatique".
Joe Biden, qui s'est entretenu mercredi avec le Premier ministre canadien Justin Trudeau, a promis d'aider à lutter contre ces incendies.
La saison des feux au Canada cette année, qui ne fait que commencer, sera "probablement la pire de l'histoire" du pays, avec "des conséquences immenses ici aux Etats-Unis", a déclaré le président américain.
- Feux "extrêmes" -
Avec près de 800.000 hectares touchés par les incendies, selon les autorités, le Québec vit une saison déjà historique. Deux fois plus de départs de feux ont été recensés depuis janvier par rapport à la moyenne à cette époque sur les 10 dernières années.
Jeudi, la province francophone recense toujours plus de 150 feux actifs, dont près de 90 hors de contrôle. De nouveaux renforts -- américains, français, portugais... -- sont attendus dans les heures et les jours qui viennent.
La situation demeure préoccupante dans plusieurs régions, selon Stéphane Caron, de la Société de protection des forêts contre le feu: "On est seulement au tout début de cette saison de feux."
Les risques de nouveaux départs de feux sont toujours importants: sans la partie ouest du Québec, ils sont considérés comme "extrêmes" par les autorités. Ces brasiers sont de forte intensité et à propagation rapide, donc très complexes à arrêter pour les pompiers, expliquent-elles.
S.Urciuoli--PV