Les violences urbaines marquent le pas, le jeune Nahel inhumé
La vague des violences déclenchée dans de nombreuses villes de France par la mort du jeune Nahel, tué par un policier mardi à Nanterre lors d'un contrôle routier, a marqué le pas dans la nuit de samedi à dimanche, quelques heures après l'enterrement du jeune homme à l'abri des caméras.
A 02H30 du matin, le ministère de l'Intérieur n'avait pas recensé d'incidents majeurs et faisait état de 427 interpellations dans tout le pays, notamment pour port d'objets susceptibles de servir d'armes ou de projectiles.
"Nuit plus calme grâce à l'action résolue des forces de l'ordre", s'est réjoui Gérald Darmanin en publiant ces chiffres sur son compte Twitter.
Pour la deuxième nuit consécutive, le ministre avait reconduit un dispositif de 45.000 policiers et gendarmes, dont 7.000 à Paris et en proche banlieue, et des renforts conséquents à Marseille et Lyon, les principales agglomérations touchées la veille par les heurts, destructions ou pillages.
Sur la célèbre Canebière notamment, d'importants effectifs de forces de l'ordre, épaulées par les unités d'élite du Raid et du GIGN (gendarmerie) sont parvenus à disperser les groupes de jeunes qui avaient semé le chaos la veille, ont constaté des journalistes de l'AFP.
"On n'assiste pas du tout aux scènes de pillage d'hier", a commenté la préfecture de police des Bouches-du-Rhône, dénombrant 56 arrestations vers minuit.
A Paris, un important dispositif a été déployé le long des Champs-Elysées, où des appels à se rassembler circulaient depuis vendredi sur les réseaux sociaux, a constaté une journaliste de l'AFP.
Tout au long de l'avenue, des petits groupes de jeunes vêtus de noirs ont déambulé sous les yeux de CRS devant les commerces, dont les devantures étaient protégées de planches de bois. Derrière des grilles noires, le célèbre restaurant Le Fouquet's a accueilli normalement ses clients pour le dîner.
Les derniers groupes ont été évacués avant 02H00.
- Macron reste en France -
Peu d'incidents sérieux ont été rapportés en banlieue parisienne, point de départ des émeutes. Des policiers ont été toutefois la cible de tirs de mortiers d'artifice à Vigneux (Essonne). Selon le ministère de l'Intérieur, 162 personnes avaient été interpellées à 02H30 dans Paris et sa banlieue.
Dans la nuit de vendredi à samedi, les forces de l'ordre avaient procédé à plus de 1.300 interpellations, un chiffre record depuis mardi.
Saisi par une vidéo amateur venue contredire le récit initial livré par les policiers, le tir à bout portant d'un motard et la mort de Nahel lors d'un contrôle routier à Nanterre ont choqué jusqu'au sommet de l'Etat, embrasé le pays et résonné bien au-delà des frontières françaises et notamment en Algérie, le pays d'origine de sa famille.
Dans ce climat, Emmanuel Macron a annoncé samedi à son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier le report de sa visite d'Etat prévue de dimanche soir à mardi. Le chef de l'Etat a passé samedi après-midi une série d'appels téléphoniques à des maires du pays, inquiets de la spirale de violences qui secoue le pays.
Pour tenter de l'enrayer, de nombreuses communes ont instauré un couvre-feu et les réseaux de transport en commun ont été fermés plus tôt que prévu, notamment celui des bus et tramways d'Ile-de-France à partir de 21H00.
Dans la matinée, l'ambiance était très tendue devant le funérarium entre des groupes de jeunes et la presse, dont la présence n'était pas souhaitée par la famille, ont constaté des journalistes de l'AFP.
- "Venus pour casser" -
"Paix à son âme, que justice soit faite", a lancé sous couvert d'anonymat à l'AFP une Nanterrienne en sortant du funérarium. "Je suis venue soutenir la maman, elle n'avait que lui, la pauvre".
Les scènes de destruction et de pillages de commerces qui secouent de nombreuses villes de France ont suscité la stupeur et la colère de leurs habitants.
"Ils sont venus spécialement pour casser, voler et repartir", a déploré à Marseille un commerçant du centre commercial du Merlan, Youcef Bettahar, "on est vraiment dégoûté de ce qu'il se passe".
Dans la nuit de vendredi à samedi, 1.350 véhicules ont été incendiés, 266 bâtiments ont été incendiés ou dégradés, dont 26 mairies et 24 écoles, et 2.560 feux comptabilisés sur la voie publique, selon le ministère de l'Intérieur.
Des bâtiments de la police et de la gendarmerie ont été la cible d'attaque, 79 policiers et gendarmes ont été blessés. "La prochaine personne qui touche un policier ou un gendarme doit savoir qu'elle sera retrouvée", a averti Gérald Darmanin samedi soir.
La question de l'état d'urgence reste posée et surveillée à l'étranger, d'autant plus que la France accueille à l'automne la Coupe du monde de rugby, puis les Jeux olympiques à Paris à l'été 2024.
Cette vague de violences et la colère de nombreux jeunes habitants des quartiers populaires contre la police ou l'Etat ont rappelé les émeutes qui avaient secoué la France en 2005, après la mort de deux adolescents poursuivis par la police.
Le policier de 38 ans auteur du coup de feu qui a tué Nahel a été mis en examen pour homicide volontaire et placé en détention provisoire jeudi après-midi.
L.Guglielmino--PV