En Uruguay, un club incarne la passion du rugby depuis 162 ans
En Uruguay, à 11.000 kilomètres de son berceau britannique, la passion pour le rugby imprègne le Montevideo Cricket Club, un des plus anciens clubs du monde, pionnier en Amérique et pépinière de talents pour la sélection nationale, qui dispute son 5e Mondial en France.
Au siège du club, à Solymar, à une vingtaine de km du centre de Montevideo, vieux maillots, casquettes et fanions encadrés témoignent de la longue histoire du MVCC.
C'est en 2006 que le "World Rugby Museum", basé dans l'antre de Twickenham, en Angleterre, a reconnu le MVCC comme "le huitième plus ancien club de rugby encore en activité", s'enorgueillit Henry Frederick, un dirigeant du MVCC, club né le 18 juillet 1861 de la volonté de trois Anglais réunis dans un élégant salon de thé de la capitale de l'Uruguay.
Et si le club porte toujours sur son écusson les trois lions présents sur les armoiries royales anglaises et britanniques et respecte toujours à la lettre le "fair-play" anglais, il n'est plus interdit de rentrer dans ses locaux avec du maté --la boisson traditionnelle sud-américaine--, ni obligatoire de parler anglais pour y adhérer.
- 90% de licenciés en rugby -
Né sur les cendres du Victoria Cricket Club, le MVCC a aussi introduit dans le petit pays sud-américain de 3,4 millions d'habitants le football, l'athlétisme, le cyclisme ou encore le tennis. Mais c'est aujourd'hui, avant tout, un club de rugby.
"Sur les 500 membres du club, 90% sont licenciés en rugby", explique à l'AFP son président Fabian Sfeir. Le club compte des équipes dans toutes les catégories d'âge à partir de 6 ans et a également une équipe féminine senior.
"Le club a toujours été étroitement lié au développement du rugby en Uruguay", rappelle M. Sfeir. "Nous avons des joueurs dans l'équipe nationale et on contribue dans les différentes catégories, pas seulement dans l'équipe senior".
Du sélectionneur du Chili Pablo Lemoine, premier professionnel uruguayen recruté en 1998 par Bristol (Angleterre) avant de faire les belles heures du Stade Français, à Diego Magno, premier rugbyman des Amériques à dépasser les 100 sélections, de nombreux internationaux uruguayens ont été pouponnés au MVCC.
C'est aussi le cas du pilier Diego Arbelo et de l'ailier Juan Manuel Alonso, appelés sous les couleurs des "Teros" --du nom de l'oiseau qui est leur symbole-- pour la Coupe du monde en France.
- "Plus vivant que jamais" -
Le rugby a historiquement été un sport amateur en Uruguay, jusqu'au tournant de l'année 2020, avec l'émergence du "Super rugby americas", un tournoi de clubs d'Amérique du Sud --qui s'est ouvert en 2023 à l'Amérique du Nord--, dans lequel l'Uruguay est représenté par la franchise Peñarol Rugby, championne ces deux dernières années.
Quelque 20 des 33 joueurs sélectionnés pour le Mondial évoluent d'ailleurs au Peñarol Rugby. Trois sortent des rangs des "Old boys" de Montevideo --créé également par des migrants britanniques--, concurrent du MVCC dans le championnat national.
Pour Fabian Sfeir, le secret de la longévité du MVCC réside dans le "sentiment d'appartenance à une famille" que génère le rugby: "Plusieurs des garçons d'aujourd'hui sont les fils de joueurs ou de dirigeants du club, ils sont nés dans le club, y étaient déjà dans le ventre de leur mère, ce qui aide beaucoup à consolider les liens et à garder le club plus vivant que jamais".
En témoigne par exemple le cas de Pablo Lemoine, qui a fini sa carrière de joueur au MVCC et ne manque jamais de passer au club quand il est en Uruguay.
Autre ancienne gloire du club --sa "deuxième maison"--, Diego Magno assiste en bord de terrain à un match des U17 du MVCC.
Du haut de ses 108 sélections, il se réjouit de "l'évolution" du rugby en Uruguay. "Elle se voit ici", sourit-il en montrant les jeunes en maillot orange et bleu qui évoluent devant lui.
F.Abruzzese--PV