Violences sexuelles dans une secte: 15 personnes présentées à des juges
Au terme de leur garde à vue, le gourou d'un mouvement international de yoga accusé d'être une secte organisant des violences sexuelles et 14 autres personnes devraient être présentées vendredi à des juges d'instruction parisiens en vue d'une mise en examen.
Une source judiciaire a indiqué jeudi soir à l'AFP que "quinze déferrements sont envisagés aux fins de présentation au magistrat instructeur" vendredi dans la journée.
Ces présentations font suite aux 41 interpellations révélées mardi par Libération et RFI.
De ce dossier décrit à l'AFP il y a un mois par une source proche comme "démentiel, avec un groupe aux contours de la mafia, du proxénétisme sous des atours prétendument philosophiques", dont Gregorian Bivolaru, 71 ans, aspect peu soigné, grosses lunettes, est le personnage central.
Gourou de nationalité roumano-suédoise, il est la figure fondatrice du Mouvement pour l'intégration spirituelle vers l'absolu (Misa).
Ce groupe ancien rebaptisé Atman lors de son expansion hors de Roumanie se présente comme axé sur la pratique du tantra yoga mais est accusé de cacher une secte qui pratique des violences sexuelles à grande échelle.
Comment ? En "conditionnant les victimes à accepter des relations sexuelles via des techniques de manipulation mentale visant à supprimer toute notion de consentement", décrit la source judiciaire.
Le mouvement aurait incité des femmes "à accepter des relations sexuelles" avec Gregorian Bivolaru et/ou à "s'adonner à des pratiques pornographiques tarifées en France et à l'étranger", selon une source proche de l'enquête.
"Un +ashram+ était manifestement exclusivement dédié à la satisfaction des désirs" du gourou, où les femmes "étaient conduites depuis d'autres établissements, selon la source judiciaire.
Avec M. Bivolaru, très connu en Roumanie et qui a fondé en 1970 la première école de yoga dans le pays alors communiste, ont été arrêtées des personnes suspectées d'être des "responsables importants" de cette secte, qui aurait plusieurs centaines d'adeptes en France, selon la source proche de l'enquête.
Les arrestations ont eu lieu notamment en Seine-et-Marne, dans le Val-de-Marne, à Paris et dans les Alpes-Maritimes, au cours d'une opération qui a mobilisé 175 policiers.
Elle a été coordonnée par la cellule d'assistance et d'intervention en matière de dérives sectaires (Caimades) de l'OCRVP (Office central pour la répression des violences aux personnes).
- "Accusations absurdes" -
En même temps que les interpellations, 26 femmes ont été "extraites de la secte" alors qu'elles "étaient logées dans des conditions d'exiguïté et d'hygiène déplorables", a souligné la source judiciaire.
Plus généralement, "de nombreuses femmes de différentes nationalités déclarent avoir été victimes", selon cette source.
L'enquête est née d'un signalement en juillet 2022 de la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires), informée par la Ligue des droits de l'Homme de 12 témoignages d'anciens membres du Misa.
Le parquet de Paris a ensuite ouvert une information judiciaire pour diverses infractions dont séquestration en bande organisée, un crime puni d'un maximum de 30 ans de prison, abus de faiblesse en bande organisée par membre d'une secte, viols ou traite des êtres humains en bande organisée.
Dès 2008, le Misa avait été exclu "de la Fédération internationale de yoga et de l'Alliance européenne de yoga pour ses pratiques commerciales jugées illicites", a rappelé la source judiciaire.
Le mouvement a déjà fait l'objet de procédures judiciaires en Europe.
Son fondateur, poursuivi dans son pays à plusieurs reprises, a fui et obtenu l'asile politique en Suède début 2006 ainsi qu'un nouveau nom: Magnus Aurolsson.
Condamné par défaut en Roumanie en 2013 à six ans d'emprisonnement, il disparaît quelques années avant d'être arrêté en février 2016 en France, alors qu'il était en cavale.
Remis aux autorités roumaines, il s'était évaporé à nouveau, avant d'être retrouvé mardi dans l'Hexagone.
Le Misa a publié un communiqué jeudi en roumain pour dénoncer des "accusations absurdes" contre Gregorian Bivolaru, "cible depuis les années 1990 de campagnes médiatiques de discrédit".
"A la fin, nous sommes convaincus que la vérité triomphera", veut croire le mouvement.
B.Cretella--PV