Procès Zepeda : "ne libérez jamais cet homme!"
"Ne libérez jamais cet homme!" : les soeurs de Narumi Kurosaki ont fustigé mardi devant la cour d'assises de la Haute-Saône le Chilien Nicolas Zepeda, cause de leur "souffrance" et dont elles estiment qu'il ne dira "jamais la vérité" sur la disparition de l'étudiante japonaise qu'il est soupçonné d'avoir assassinée.
"Il nous a donné un désespoir et une douleur insupportable qui va durer jusqu’à la fin de notre vie", a lancé Honani Kurosaki lors d'une longue et très émouvante déposition.
Narumi a disparu en décembre 2016 et "sept après, (Nicolas Zepeda) ne dira pas la vérité. Je ne veux pas que le mort de Narumi ait été inutile. Ne libérez jamais cet homme !", s'est-elle exclamé.
"On ne sait même pas où son corps a été abandonné", s'insurge encore celle qui se présente comme la "cadette de deux ans" de Narumi. "Quel injustice ! Imaginez mon désespoir de continuer à vivre dans un tel monde injuste et cruel!"
- "Rapatrier son âme" -
Elle explique que, après la disparition de Narumi, la mère et les deux soeurs sont venues en France pour "rapatrier son âme. Nous sommes restées plantées longtemps devant le bâtiment" où Narumi logeait à Besançon "en lui adressant des mots : +tu as dû souffrir, ça dû faire mal mais maintenant, rentrons au Japon+", a confié la jeune femme, souvent secouée de sanglots.
L'émotion se lit sur le visage des jurés. Debout à côté d'elle, la voix de Takashi Furugaichi, l'interprète, s'altère à plusieurs reprises, la gorge serrée par l'émotion.
Elle dit sa culpabilité d'avoir survécu à Narumi et revient longuement sur la déflagration qu'a représenté pour sa famille la perte de cette grande soeur, notamment pour sa mère qui voulait "se suicider à tout moment".
La cause de cette "souffrance", c'est Nicolas Zepeda, lâche-t-elle, "c'est cet homme qui l'a assassinée!", martèle-t-elle. Dans son box, le Chilien, impassible jusque-là, ferme les yeux et lâche quelques mots inaudibles.
Auparavant, sa soeur Kurumi, 24 ans, avait exhorté M. Zepeda à dire où se trouve le corps de Narumi, jamais retrouvé malgré d'intenses recherches.
"Ici, une seule personne sait" où est Narumi, a déclaré à la barre cette employée dans une boutique. "Mon souhait est de demander à l'accusé de dire la vérité."
Le président de la cour, François Arnaud, interroge le Chilien, qui clame son innocence : "Si vous êtes impliqué d'une quelconque manière, avez-vous le moyen d'apporter une réponse ?" La salle tend l'oreille, l'accusé se lève, saisit le micro: "Je ne sais pas où elle se trouve"...
Kurumi a elle aussi convoqué le souvenir de sa "grande soeur", un modèle pour elle, qui a occupé une place centrale lors du divorce de ses parents.
"Il faut coûte que coûte survivre" pour Narumi, tranche-t-elle, tout en confiant que sa "culpabilité d'avoir survécu (la) pousse à vouloir (se) suicider parfois".
- "Vivez!" -
"Vivez, vivez pleinement, vivez doublement, au moins en souvenir de Narumi", lui lance l'avocat général Etienne Manteaux.
Autre partie civile, Arthur Del Piccolo, petit ami de Narumi au moment de sa disparition, est quant à lui venu dire à la barre son deuil impossible, lors d'une matinée entièrement consacrée à sa déposition.
"Chaque année en décembre, je pense automatiquement à elle (...) Narumi et moi, on aurait pu aller bien ensemble". Lui aussi réclame "justice" et que "le coupable soit condamné".
La défense de Nicolas Zepeda entre ensuite en scène. Le moment est attendu: les avocats de Nicolas Zepeda, Renaud Portejoie et Sylvain Cormier, tournent en effet depuis le début du procès autour du jeune homme, semblant vouloir en faire une sorte de potentiel coupable bis et instiller le doute quant à la culpabilité de leur client.
Mais le jeune ingénieur commercial de 28 ans, qui travaille au Japon, tient tête aux deux conseils, répondant avec calme et à propos.
"J'ai bien compris que la défense voulait faire de moi un suspect" et "semer le doute", a-t-il analysé après l'audience. "Mais j'ai rempli mon rôle".
Depuis l'ouverture il y a une semaine de son procès en appel à Vesoul, Nicolas Zepeda continue de nier toute implication dans l'assassinat de Narumi Kurosaki, brillante étudiante japonaise de 21 ans disparue le 5 décembre 2016 à Besançon.
Condamné à 28 ans de réclusion en première instance, il encourt la perpétuité. Le verdict est attendu la semaine prochaine.
F.M.Ferrentino--PV