Mort de Jeremie Cohen: pas de "motifs discriminatoires" à ce stade, selon le procureur
L'enquête sur la mort de Jeremie Cohen, jeune homme de confession juive percuté par un tramway mi-février, ne permet pas selon le procureur de Bobigny d'établir à ce stade de "motifs discriminatoires", contrairement aux affirmations de certains candidats à la présidentielle qui ont pointé un possible acte antisémite.
"Il ne ressort pas des témoignages recueillis jusqu’à présent que l'agression ait été commise pour des motifs discriminatoires", a déclaré le procureur de Bobigny Eric Mathais, mardi lors d'une conférence de presse.
M. Mathais a affirmé qu'"aucun élément ne permet à ce jour d'établir avec certitude que la victime était porteuse de manière apparente ou non d'une kippa au moment de la scène de violence".
Une mise au point qui intervient alors que ce drame a fait réagir toute la classe politique jusqu'à l'Elysée.
Le président et candidat Emmanuel Macron a demandé mardi "la clarté complète" sur cette affaire qui ne doit pas donner lieu à "manipulations politiques", alors que d'autres candidats avaient dénoncé un acte possiblement antisémite.
Le mercredi 16 février vers 20H, ce jeune homme de 31 ans, souffrant d'un handicap non visible, comme l'a précisé sa famille à Radio Shalom, traversait les voies ferrées quand il a été percuté par le tramway à Bobigny (Seine-Saint-Denis) après avoir été frappé par des jeunes.
En arrêt cardio-respiratoire et victime d'un traumatisme crânien, il est décédé à l'hôpital peu après minuit.
A la suite de ce drame, une première enquête a été ouverte pour "homicide involontaire par conducteur".
Les différentes investigations ont permis d'établir que l'infraction pénale visant le conducteur n'était "pas caractérisée", a expliqué le procureur, précisant que cette enquête avait été classée sans suite le 22 février.
Deux semaines après, le 10 mars, une vidéo filmée par un témoin et montrant l'altercation et le choc avec le tramway était transmise au commissariat. Dans la foulée, une enquête a été ouverte pour "violences volontaires en réunion", a relaté Eric Mathais, qui a reçu la famille du défunt.
- "Manipulations politiques" -
Cette même vidéo a aussi été transmise quelques jours plus tard aux enquêteurs par la famille, qui s'était rendue sur les lieux pour recueillir des témoignages.
Sur ces images, largement relayées sur les réseaux sociaux, on voit le jeune homme recevoir de violents coups de poing, encerclé par une dizaine de personnes. Il tombe à terre, se relève puis traverse en courant la chaussée, l'air désorienté, avant d'être percuté par le tramway.
L'enquête, désormais sous l'égide d'un juge d'instruction, est menée par les enquêteurs de la police judiciaire du département.
A cinq jours du premier tour de l'élection présidentielle, ce drame est devenu un fait politique, abondamment commenté par les candidats.
Le candidat d'extrême droite Eric Zemmour (Reconquête!) est le premier à avoir médiatisé l'affaire à la demande de la famille de la victime dont il a reçu le père mardi matin.
"Est-il mort pour fuir les racailles? Est-il mort parce que juif? Pourquoi cette affaire est-elle étouffée?", a-t-il écrit lundi sur Twitter. Sa rivale Marine Le Pen (RN) a évoqué un "acte criminel" qui "pourrait être un meurtre antisémite".
"Toute la lumière doit être faite", sur le drame, ont de leur côté demandé trois autres candidats à la présidentielle, Jean-Luc Mélenchon (LFI), Yannick Jadot (EELV) et Valérie Pécresse (LR) qui a dénoncé un "lynchage ignoble qui pourrait être de nature antisémite".
Nathalie Arthaud (LO) a elle dénoncé "une instrumentalisation" par Eric Zemmour.
Le souci de la famille est "d'avancer avec l'autorité judiciaire sans aucune récupération", avait réagi lundi soir sur BFMTV, l'avocat de la famille Franck Serfati. "La famille Cohen ne vient pas crier à l'antisémitisme", a-t-il ajouté.
N.Tartaglione--PV