Le procès du meurtrier présumé du policier Eric Masson commence à Avignon
Le procès d'Ilias Akoudad, accusé du meurtre du brigadier Eric Masson tué en 2021 sur un point de deal à Avignon, a commencé lundi. Face à un dossier accablant, va-t-il continuer à nier en bloc ?
Le jeune homme de 22 ans, survêtement de marque noir et gris, petite barbe noire, s'est installé dans le box des accusés de la cour d'assises du Vaucluse, en retard, vers 10H10, l'ouverture de l'audience ayant été retardée par une difficulté d'extraction d'un coaccusé.
Ses avocats, le ténor du barreau de Lille Frank Berton et l'avocate parisienne Elise Arfi, n'ont pas souhaité s'exprimer en amont des débats qui doivent durer deux semaines.
Face à eux dans la salle, des dizaines de policiers, beaucoup d'anciens coéquipiers d'Eric Masson, les visages graves, soutenus par le patron de la police nationale Frédéric Veaux qui a fait le déplacement.
La famille, évitant les nombreuses caméras, s'est installée discrètement sur les bancs des parties civiles.
L'accusé principal nie farouchement les faits depuis le début. Il assure qu'il n'était pas présent, le 5 mai 2021, rue du Râteau, dans ce quartier historique de la cité des papes, lorsqu'Eric Masson a été abattu à bout portant, en marge d'une banale opération de surveillance d'un point de deal.
Quatre jours plus tard, deux jeunes de 19 et 20 ans sont arrêtés sur l'autoroute en direction de l'Espagne. Le plus jeune, Ilias Akoudad, est alors désigné comme le tireur par au moins deux témoins, son camarade de fuite, présent lors du contrôle fatal, et le coéquipier d'Eric Masson.
L'enquête montrera également qu'une ligne téléphonique, dont il a finalement reconnu l'utilisation, avait borné dans cette rue à l'heure des faits. Et des résidus de tirs ont été retrouvés sur ses vêtements.
"Je ne vois pas comment il peut rester dans ce système de défense", confiait il y a quelques jours Me Sabine Gony-Massu, avocate de la compagne d'Eric Masson, de ses filles et de Romain, son coéquipier le jour du drame.
"Je pense qu'il reconnaîtra", "la culpabilité ne fait aucun doute. La sérénité commande que les choses soient dites face à autant de charges", avançait également Me Philippe Expert, avocat des parents d'Eric Masson et de son frère et sa sœur, eux aussi policiers, dans le sillage de leur père.
- "Plaie difficile à refermer" -
Déjà condamné six fois, notamment pour trafic de stupéfiants, le jeune homme, poursuivi pour meurtre et tentative de meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique - pour avoir aussi tiré sur Romain - risque la perpétuité. Le statut de policier d'Eric Masson est en effet une circonstance aggravante "lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur".
Mais l'accusé savait-il, comme l'a conclu l'enquête, qu'il tirait sur un policier ? Eric Masson portait-il son brassard à la main ? A-t-il crié "police" ? Pourquoi le meurtrier a-t-il tiré alors qu'il n'était pas contrôlé ?
Autant de questions qui seront au cœur d'un procès qui s'annonce "extrêmement tendu, forcément politique", selon Me Charlène Neveu-Sanchez qui défend le troisième mis en cause, le logeur des deux jeunes hommes lors de leur fuite.
Ce meurtre est "une plaie difficile à refermer", qui "a remué la ville et les policiers dans son ensemble", selon Florence Galtier, procureure de la République à Avignon, qui officie en personne pour cette audience.
Excepté Ilias Akoudad, les deux autres accusés sont jugés pour des délits connexes qui relèvent habituellement de la correctionnelle, ont insisté leurs avocats.
Ayoub Abdi, 23 ans, qui accompagnait le tireur le jour des faits et a fui avec lui, et Ismaël Boujti, 24 ans, qui leur avait prêté sa cave, qui servait d'épicerie clandestine, sont seulement poursuivis pour soustraction d'un criminel à l'arrestation ou aux recherches.
Les témoignages d'Ayoub Abdi, seul accusé à comparaître libre, et de Romain, le collègue d'Eric Masson, seront déterminants.
Depuis le drame, ce dernier est toujours dans la police, mais loin d'Avignon.
"Le mot d'ordre est le soutien à la famille", a indiqué Claude Simonetti, représentant vauclusien du syndicat Unité SGP Police FO.
I.Saccomanno--PV