Le suspect du meurtre du policier Eric Masson continue de nier au début de son procès
A l'ouverture de son procès, Ilias Akoudad, accusé du meurtre du brigadier Eric Masson, tué en 2021 sur un point de deal à Avignon, est resté sur ses dénégations. Une position "intenable", selon les parties civiles, face à un dossier accablant.
Très attentif pendant la longue lecture du dossier, le principal accusé, survêtement noir et gris, a déclaré: "Je conteste les faits qui me sont reprochés, je maintiens mes déclarations".
Face à lui, sur les bancs des parties civiles, la famille, très discrète, évitant les nombreuses caméras, fixait de façon impassible le box des accusés. Des dizaines de policiers, beaucoup d'anciens coéquipiers d'Eric Masson, les visages graves, étaient également présents dans la salle d'audience.
Ils étaient soutenus par le patron de la police nationale, Frédéric Veaux, qui avait fait le déplacement face à ce qui "reste un traumatisme pour la police nationale", a-t-il déclaré aux journalistes.
Ilias Akoudad, 22 ans, nie donc farouchement les faits depuis le début. Il assure qu'il n'était pas présent, le 5 mai 2021, rue du Râteau, dans ce quartier historique de la Cité des papes, lorsqu'Eric Masson a été abattu à bout portant, en marge d'une banale opération de surveillance d'un point de deal.
Quatre jours plus tard, deux jeunes de 19 et 20 ans sont arrêtés sur l'autoroute en direction de l'Espagne. Le plus jeune est alors désigné comme le tireur par au moins deux témoins, son camarade de fuite, présent lors du contrôle fatal, et le coéquipier d'Eric Masson.
L'enquête montrera également qu'une ligne téléphonique, dont il a finalement reconnu l'utilisation, avait borné dans cette rue à l'heure des faits. En outre, des résidus de tirs ont été retrouvés sur ses vêtements.
Pour Me Philippe Expert, l'un des avocats de la famille, les dénégations d'Ilias Akoudad sont vécues comme une forme "d'arrogance", qui accentue la "douleur" des proches, confrontés pour la première fois à l'accusé.
- Position tenable sur 15 jours de procès ? -
"Le procès dure quinze jours, laissons à l'audience le temps peut-être de produire ses effets", car "si on s'en tient à l'instruction c'est une position difficilement tenable", a ajouté l'avocat qui conseille les parents et la soeur et le frère de la victime, eux aussi policiers, dans le sillage de leur père.
"Je ne vois pas comment il peut rester dans ce système de défense", confiait il y a quelques jours Me Sabine Gony-Massu, avocate de la compagne d'Eric Masson, de ses filles et de Romain, son coéquipier le jour du drame.
Déjà condamné six fois, notamment pour trafic de stupéfiants, le jeune homme, poursuivi pour meurtre et tentative de meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique -pour avoir aussi tiré sur Romain- risque la perpétuité. Le statut de policier d'Eric Masson est, en effet, une circonstance aggravante "lorsque la qualité de la victime est apparente ou connue de l'auteur".
Mais l'accusé savait-il, comme l'a conclu l'enquête, qu'il tirait sur un policier ? Eric Masson portait-il son brassard à la main ? A-t-il crié "police" ? Pourquoi le meurtrier a-t-il tiré alors qu'il n'était pas contrôlé ?
Autant de questions qui seront au cœur d'un procès qui s'annonce "extrêmement tendu, forcément politique", selon Me Charlène Neveu-Sanchez qui défend le troisième mis en cause, le logeur des deux jeunes hommes lors de leur fuite.
Ce meurtre est "une plaie difficile à refermer", qui "a remué la ville et les policiers dans son ensemble", selon Florence Galtier, procureure de la République à Avignon, qui officie en personne pour cette audience.
Excepté Ilias Akoudad, les deux autres accusés sont jugés pour des délits connexes relevant habituellement de la correctionnelle, ont insisté leurs avocats.
Ayoub Abdi, 23 ans, qui accompagnait le tireur le jour des faits et a fui avec lui, et Ismaël Boujti, 24 ans, qui leur avait prêté sa cave, qui servait d'épicerie clandestine, sont seulement poursuivis pour soustraction d'un criminel à l'arrestation ou aux recherches. Le premier a reconnu les faits lundi matin, le second les a niés.
Les témoignages d'Ayoub Abdi, seul accusé à comparaître libre, et de Romain, le collègue d'Eric Masson, seront déterminants.
H.Ercolani--PV