Un drapeau à l'envers bien embarrassant pour la Cour suprême américaine
C'est un drapeau volontairement hissé à l'envers qui vient aggraver les soupçons de partialité de la Cour suprême américaine: Ce symbole trumpiste photographié en 2021 au domicile d'un juge embarrasse l'institution au moment où elle doit statuer sur l'immunité pénale invoquée par l'ex-président.
Plusieurs élus démocrates ont appelé vendredi ce magistrat très conservateur, Samuel Alito, à se récuser de tout dossier lié au scrutin de 2020 ou à l'assaut du Capitole le 6 janvier 2021. Ils lui demandent notamment de ne pas statuer sur l'immunité pénale invoquée par Donald Trump dans la procédure fédérale à son encontre pour tentatives d'inverser illégalement les résultats de la présidentielle de 2020.
Les neuf juges de la Cour suprême ont paru en avril hermétiques aux arguments en faveur d'une immunité pénale absolue pour un ex-président, mais la date aussi bien que la formulation de leur décision pourrait définitivement compromettre la tenue du procès de Donald Trump avant l'élection de novembre.
Le New York Times a révélé jeudi soir qu'en janvier 2021, pendant plusieurs jours avant l'entrée en fonction du président démocrate Joe Biden, un drapeau américain à l'envers avait été hissé devant la maison de Samuel Alito, en banlieue de Washington.
Ce magistrat de 74 ans, considéré comme le plus à droite de la haute cour, est notamment connu pour avoir rédigé en 2022 l'arrêt retentissant qui a supprimé la protection fédérale du droit à l'avortement.
A l'origine un signal de détresse dans l'armée, le drapeau américain à l'envers est devenu un signe de protestation politique et exprimait à l'époque une adhésion aux affirmations du président républicain sortant Donald Trump que l'élection lui aurait été "volée".
Dans une réponse par courrier électronique au quotidien, Samuel Alito affirme n'avoir "été en rien impliqué dans le hissage du drapeau" à son domicile, évoquant une "brève" initiative de son épouse en réaction à un affichage "insultant dans le jardin d'un voisin".
- "Crise éthique" -
L'influent sénateur démocrate Dick Durbin, chef de la commission judiciaire, a affirmé que ce drapeau à l'envers "créait une apparence de parti pris".
"La Cour se trouve dans une crise éthique dont elle est la seule responsable et le juge Alito et ses collègues devraient faire tout ce qui est en leur pouvoir pour regagner la confiance publique", affirme-t-il dans un communiqué.
"Ce type de comportement est en train de couler la Cour suprême", à majorité conservatrice, s'est également inquiété sur la chaîne MSNBC un autre sénateur démocrate, Richard Blumenthal.
"La crédibilité de la Cour est en train de s'effondrer", a-t-il déploré, appelant le président de cette juridiction, John Roberts, à contraindre le juge Alito et son collègue Clarence Thomas à se récuser des affaires concernant Donald Trump.
Clarence Thomas a jusqu'à présent ignoré les appels à se récuser en raison de l'implication de son épouse dans la campagne de contestation des résultats de la dernière élection présidentielle.
La popularité et la confiance dans la Cour suprême ont sombré à des niveaux inédits, notamment en raison du renversement par la majorité conservatrice de piliers de la société libérale américaine des années 1960-1970, en particulier le droit fédéral à l'avortement en juin 2022.
Un sondage publié en février par la faculté de droit de Marquette, fait état d'un niveau d'approbation de 40 % pour l'action de la Cour, contre 60 % de désapprobation. Depuis le plus bas historique de 38 % en juillet 2022, les opinions favorables ne sont jamais remontées au-dessus du 47 %, alors qu'elles étaient majoritaires jusqu'en mars 2022, selon cette étude.
Clarence Thomas et Samuel Alito ont aussi été vilipendés pour les largesses dont ils ont bénéficié de la part de milliardaires républicains, y compris sous la forme de voyages ou de séjours.
Lors d'une conférence la semaine dernière en Alabama (sud), Clarence Thomas s'est rebiffé contre la "méchanceté" et les "mensonges" dont sa famille a été selon lui victime dans le microcosme de Washington.
Sous pression, la Cour suprême a adopté en novembre un code de conduite, sans faire taire les critiques en raison de l'absence de tout mécanisme de sanction ou d'application.
B.Cretella--PV