Raid à l'ambassade mexicaine de Quito: la CIJ rejette une demande de Mexico
La plus haute juridiction de l'ONU a rejeté jeudi une demande de mesures d'urgence du Mexique après le raid policier mené en avril contre son ambassade à Quito, affirmant que l'Équateur avait donné l'assurance que la mission diplomatique serait protégée.
Des policiers ont pénétré le 5 avril à l'intérieur de l'ambassade mexicaine dans la capitale équatorienne pour y arrêter l'ancien vice-président Jorge Glas, visé par un mandat d'arrêt pour corruption, qui s'y était réfugié.
Le Mexique a rompu ses relations diplomatiques avec Quito après l'assaut, qui a provoqué un tollé international, et déposé une requête devant la Cour internationale de justice (CIJ), dont le siège se trouve à La Haye, aux Pays-Bas.
Mexico, estimant que l'Equateur a violé le droit international, réclamait des mesures d'urgence en attendant un jugement sur le fond de l'affaire, qui peut prendre des années.
"La Cour considère que les assurances fournies par (...) l'Equateur répondent aux préoccupations exprimées par le Mexique dans sa demande", a déclaré Nawaf Salam, juge président de la CIJ.
"La cour conclut que les circonstances, telles qu'elles se présentent acutellement à elle, ne sont pas de nature à exiger l'exercice de son pouvoir d'indiquer des mesures conservatoires", a-t-il ajouté.
Lors d'une audience devant la CIJ en avril, le Mexique a déclaré que l'Equateur avait franchi une ligne rouge avec son raid, créant un "précédent déconcertant" dans les relations diplomatiques mondiales.
La CIJ se prononçait jeudi sur une demande de mesures d'urgence du Mexique pour protéger son ambassade et ses autres locaux diplomatiques à Quito et permettre au gouvernement mexicain de libérer les locaux diplomatiques et la résidence privée des agents diplomatiques.
Mexico souhaitait également que la CIJ ordonne à l'Equateur de s'abstenir de tout acte ou conduite susceptible d'aggraver le différend.
L'Equateur a assuré accéder à ces demandes, a déclaré la cour.
Les juges se pencheront ultérieurement sur le fond de l'affaire. Dans sa requête, Mexico demande à la CIJ de "suspendre l'Equateur en tant que membre des Nations unies" jusqu'à ce qu'il présente des excuses publiques.
Le Mexique souhaite également que les magistrats déclarent que cette juridiction est l'organe judiciaire approprié pour déterminer la responsabilité d'un Etat "afin d'engager un processus d'expulsion" de l'ONU.
Le pays a fondé sa requête sur la Charte des Nations unies, sur le Pacte de Bogota de 1948 - dont le but est d'obliger les Etats signataires à régler leurs différends de façon pacifique - et sur la Convention de Vienne de 1961 qui garantit la protection du personnel diplomatique.
- "Abriter un criminel" -
L'Equateur a assuré devant la CIJ que le raid contre l'ambassade mexicaine était survenu dans des "circonstances très exceptionnelles" et visait uniquement à traduire en justice un fugitif.
Quito estime que Mexico "a abusé pendant des mois" de ses locaux diplomatiques "pour abriter un criminel de droit commun dûment reconnu coupable par les plus hautes juridictions équatoriennes de très graves délits liés à la corruption".
L'Equateur a annoncé en avril avoir présenté sa propre requête devant la CIJ contre le Mexique pour violation d'"une série d'obligations internationales" après l'asile accordé à M. Glas.
Jorge Glas, vice-président équatorien de 2013 à 2017, a été arrêté à l'ambassade pour des accusations de détournement de fonds liés à des contrats de travaux publics attribués après le séisme de 2016 en Equateur.
Il a également été reconnu coupable dans une autre affaire de fraude en 2017.
Le raid, qui a eu lieu quelques heures après que le Mexique a accédé à la demande d'asile politique de M. Glas, a été condamné par plusieurs Etats d'Amérique latine, l'Union européenne, les Etats-Unis et le secrétaire général de l'ONU.
M. Glas se trouve dans la prison de Guayaquil en Equateur. Ses avocats essaient d'empêcher l'extraction des données de deux téléphones portables et d'un iPad saisis lors de son arrestation.
E.M.Filippelli--PV