Russie: reprise attendue du procès du reporter américain Evan Gershkovich
Le procès à huis clos du journaliste américain Evan Gershkovich, emprisonné en Russie et accusé "d'espionnage", doit reprendre jeudi à Ekaterinbourg (Oural), ville où il avait été arrêté fin mars 2023 lors d'un reportage.
Le correspondant du Wall Street Journal est détenu depuis presque 16 mois sur la base d'accusations que la justice russe n'a jamais étayées et que son employeur, ses proches et Washington rejettent avec véhémence.
La première audience a eu lieu fin juin et la prochaine audience initialement prévue mi-août. Mais le tribunal régional Sverdlovski a annoncé cette semaine qu'elle serait avancée à jeudi, à 11H00 (6H00 GMT), "à la demande de la défense".
Comme à l’accoutumée, elle restera fermée au public comme à la presse. La Russie, qui est accusée d'avoir monté le dossier de toutes pièces, entretient le plus grand secret autour de cette affaire.
Pour Washington, l'arrestation d'Evan Gershkovich, 32 ans, vise avant tout à monnayer un possible échange de prisonniers.
Moscou a admis négocier sa libération et le président russe Vladimir Poutine a évoqué lui-même le cas de Vadim Krassikov, en prison en Allemagne pour un assassinat commandité attribué aux services spéciaux russes.
Fin juin, la Maison Blanche a dénoncé un "simulacre" de procès, répétant que M. Gershkovich n'avait "jamais travaillé pour le gouvernement" américain, n'était "pas un espion" et "n'aurait jamais dû être arrêté".
- Détention "arbitraire" -
Au premier jour de son procès, le 26 juin, Evan Gershkovich était apparu le crâne rasé, souriant dans la cage en verre réservée aux accusés, mais n'avait fait aucune déclaration publique à la presse, comme depuis le début de son emprisonnement.
Il communique avec sa famille et ses proches via des lettres lues et censurées par l'administration pénitentiaire.
Le reporter, enfant d'immigrés ayant fui l'URSS pour les Etats-Unis, s'était installé en Russie en 2017. Il était réputé pour la qualité et le professionnalisme de ses reportages.
Début juillet, un panel d'experts de l'ONU a estimé que sa détention était "arbitraire" et qu'il devait être libéré "sans délai".
Les enquêteurs assurent que M. Gershkovich, qui avait travaillé pour l'AFP à Moscou en 2020-2021, a collecté des informations sensibles pour la CIA sur l'un des principaux fabricants russes d'armements, l'entreprise Ouralvagonzavod.
Cette usine produit notamment des chars T-90 utilisés en Ukraine et ceux de nouvelle génération Armata, alors que son activité civile est la production de wagons de marchandises.
La Russie détient plusieurs autres Américains, dont la journaliste russo-américaine Alsu Kurmasheva, arrêtée en 2023 pour une infraction à la loi sur les "agents de l'étranger", et l'ex-Marine Paul Whelan, qui purge une peine de 16 ans de prison pour espionnage, une accusation qu'il conteste.
H.Ercolani--PV