Du Foot et des diamants: coup d'envoi à Nancy du procès "Carton rouge"
Une arnaque aux crypto-monnaies ou aux diamants, pour 28 millions d'euros de préjudice et un millier de victimes: le procès "Carton rouge" s'est ouvert lundi à Nancy avec, parmi les dupés, des clubs de football.
L'audience, devant laquelle 22 personnes sont poursuivies, a débuté peu après 15H au Centre des congrès de Nancy, réquisitionné pour faire la place aux nombreuses parties civiles - plus de 850 sont enregistrées.
"Les dimensions de cette affaire, tant par le nombre de victimes, de plaignants, que le nombre de mis en cause (...) ont expliqué la mise en oeuvre de moyens spécifiques" et "extraordinaires", a observé le président du tribunal.
Au regard de l'envergure du procès, quatre magistrats du siège ont été désignés, et non trois comme il est d'usage pour les jugements en correctionnelle.
La vaste pièce aux allures de salle de spectacle n'était pas très remplie pour ce premier jour, avec seulement quelques dizaines de victimes présentes.
Marie-Bernadette Holmaer, retraitée, a fait le déplacement depuis Martigues (Bouches-du-Rhône).
Elle a perdu 10.000 euros il y a six ans, qu'elle croyait placés dans des diamants. Mais au-delà du préjudice financier, il y a le sentiment de "honte" et les répercussions morales de cette escroquerie. "Maintenant, ce sont eux qui vont avoir la honte."
Serge Cardis est lui venu des Pyrénées-Orientales dans l'espoir d'obtenir justice. Lui a perdu 70.000 euros, répartis par "petits placements" qu'il pensait investis en bitcoin, dit-il à l'AFP.
Les prévenus, dont trois sont en fuite, seront jugés durant quatre semaines pour des escroqueries visant près de 1.300 particuliers et une douzaine de clubs de football professionnel.
Au total, quelque 850 personnes se sont constituées partie civile. Le préjudice est très important: ils sont 1.300 à s'être fait escroquer pour un montant total de quelque 28 millions d'euros, via des sites internet proposant des investissements dans les diamants ou dans les crypto-monnaies, entre 2016 et 2018.
- Défense des consommateurs -
Plusieurs associations accompagnent les victimes.
"Deux enjeux majeurs" se dessinent pour la fédération France Victimes: voir quelle sera "la capacité des accusés à indemniser les victimes" et déterminer "l'éligibilité de celles-ci aux fonds de garantie".
Certaines victimes "avaient une relation avec les escrocs, elles discutaient très souvent avec elles, elles recevaient des fonds, des diamants pour certains, et donc finalement elles ne pensaient pas que c'était une escroquerie", abonde l'avocat Gaël Collin, dont le cabinet défend une centaine de victimes.
Les escrocs avaient ouvert 199 comptes en banque dans 19 pays pour collecter et transférer les fonds virés par les victimes.
"Il est essentiel de sensibiliser la population" sur le risque cyber, tandis que "la cybermalveillance augmente", renchérit Anne-Sophie Gavriloff, présidente de France Victimes 54.
Une vingtaine de sites frauduleux ont été créés par les malfaiteurs, qui mettaient des particuliers en relation avec d'autres membres de l'organisation, pour servir de support aux escroqueries.
- De Marseille à Israël -
Trois clubs de football professionnel ont aussi été escroqués par des individus basés à Marseille et en Israël.
Ces derniers avaient ouvert des comptes en banque un peu partout en Europe ainsi que des lignes téléphoniques, avant de se faire passer pour de faux agents de joueurs.
Ils tentaient de détourner les salaires des footballeurs en prétendant que les joueurs avaient changé de coordonnées bancaires.
Sochaux, Angers et Toulouse, qui évoluaient en Ligue 1 ou 2 en 2017-2018, ont au total versé une soixantaine de milliers d'euros. Une dizaine d'autres clubs ont été visés par des tentatives.
Parmi les prévenus, les degrés d'implication sont divers. Cinq d'entre eux sont renvoyés tant pour les escroqueries sur internet que pour celles au préjudice des clubs de foot, un seul uniquement pour les clubs.
R.Lagomarsino--PV