Manifestations en Iran: le guide suprême accuse les Etats-Unis et Israël
Le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a accusé lundi les ennemis jurés que sont les Etats-Unis et Israël d'avoir fomenté le mouvement de contestation antigouvernemental déclenché par la mort le 16 septembre de Mahsa Amini à Téhéran.
"Je dis clairement que ces émeutes et l'insécurité sont l'oeuvre des Etats-Unis, du régime sioniste (Israël, NDLR) usurpateur, leurs mercenaires et certains Iraniens traîtres qui les ont aidés à l'étranger", a déclaré l'ayatollah Khamenei, 83 ans, dans sa première réaction aux manifestations.
Mahsa Amini, une Kurde iranienne de 22 ans, est décédée le 16 septembre, trois jours après son arrestation pour infraction au code vestimentaire strict de la République islamique qui oblige notamment les femmes à porter le voile.
Sa mort a déclenché une vague de manifestations en Iran et des rassemblements de solidarité avec les femmes iraniennes dans de nombreuses villes du monde, notamment à Paris encore dimanche.
Ce mouvement de contestation, le plus important en Iran depuis celui de 2019 provoqué par la hausse des prix de l'essence, est entré dans sa troisième semaine et la répression s'est accrue.
De violents incidents se sont produits dans la nuit de dimanche à lundi dans l'Université de technologie Sharif à Téhéran, la plus prestigieuse d'Iran.
La police anti-émeute a tiré des billes d'acier et des gaz lacrymogènes contre des étudiants qui scandaient "Femme, vie, liberté", "les étudiants préfèrent la mort à l'humiliation", selon l'agence de presse iranienne Mehr.
Des incidents sont également survenus à l'université d'Ispahan (centre).
Mais aux yeux du guide suprême, "la police est obligée de tenir tête aux criminels et d'assurer la sécurité de la société".
"La mort de la jeune fille nous a brisé le cœur, mais ce qui n'est pas normal, c'est que certaines personnes, sans preuve ni enquête, rendent les rues dangereuses, brûlent le Coran, retirent le foulard des femmes voilées, mettent le feu aux mosquées et aux voitures", a-t-il ajouté.
- "N'ayez pas peur!" -
Le ministère iranien du Renseignement avait indiqué vendredi que neuf ressortissants étrangers -- notamment de France, d'Allemagne, d'Italie, des Pays-Bas et de Pologne -- avaient été arrêtés en lien avec les manifestations.
Une globe-trotteuse italienne de 30 ans a affirmé être détenue en Iran: "Ils m'ont arrêtée, je suis dans une prison à Téhéran. Aidez-moi s'il vous plaît...", a déclaré Alessia Piperno lors d'une brève conversation téléphonique avec ses parents dimanche, selon le quotidien italien Il Messaggero.
De son côté, l'ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo, a publié deux vidéos, l'une montrant apparemment des policiers iraniens à motos poursuivant des étudiants qui courent dans un parking souterrain, et l'autre, des policiers à moto emmenant des personnes dont la tête est recouverte de sacs en tissu noir.
Pour la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, il est "difficile de supporter ce qui se passe à l'université #Sharif en #Iran". Le courage des Iraniens est incroyable", a-t-elle tweeté.
Sur d'autres images mises en ligne, que l'AFP n'a pu vérifier de manière indépendante, on peut entendre des tirs et des cris alors qu'un grand nombre de personnes courent dans une rue la nuit.
Dans une vidéo tournée selon l'IHR dans une station de métro de Téhéran, une foule scande: "N'ayez pas peur! N'ayez pas peur! Nous sommes tous ensemble!".
Le Centre pour les droits de l'homme en Iran (CHRI), basé à New York, s'est dit "extrêmement préoccupé par les vidéos provenant de l'Université Sharif et de Téhéran aujourd'hui, montrant une répression violente des manifestations".
Au moins 92 personnes ont été tuées en Iran par la répression depuis le début des manifestations, selon l'ONG Iran Human Rights (IHR) qui s'efforce d'évaluer le nombre de morts malgré les coupures d'Internet et les blocages d'applications comme WhatsApp ou Instagram et d'autres services en ligne en Iran.
Les autorités iraniennes affirment quant à elles qu'environ 60 personnes parmi lesquelles douze membres des forces de sécurité ont été tuées depuis le 16 septembre.
O.Mucciarone--PV