Au procès Lelandais, la parole aux avocats des parties civiles
"Un criminel dangereux", un mystère", "un prédateur"... Les avocats des parties civiles ont dressé mercredi un portrait sombre de Nordahl Lelandais devant la cour d'assises de l'Isère, appelée à le juger pour le meurtre de la petite Maëlys en août 2017.
C'est Me Yves Crespin, avocat de deux associations de protection de l'enfance, qui a ouvert les plaidoiries des parties civiles, face à l'ancien militaire qui aura 39 ans le jour du verdict, attendu vendredi.
"C'est cet homme que vous avez à juger", dit-il "Vous n'avez pas à comprendre, vous ne le pourrez jamais".
"Je ne peux pas m'extraire de l'émotion que provoque un procès d'assises. Ma voix va certainement s'étrangler", avait prévenu celui qui, à 75 ans, s'apprête à tirer sa révérence après "30 ans de militantisme et 50 ans de barreau".
Nordahl Lelandais est jugé depuis le 31 janvier par la cour d'assises de l'Isère pour le meurtre de Maëlys De Araujo, une enfant de 8 ans, précédé d'enlèvement et séquestration, ainsi que pour des agressions sexuelles contre deux cousines de 4 et 6 ans, au cours du même été 2017.
Poussé dans ses retranchements au fil des trois semaines de débats, l'ancien maître-chien a admis avoir des penchants pédophiles vis à vis de ses cousines. Il a aussi reconnu avoir tué "volontairement" Maëlys en évoquant un accès de panique. Et il a répété qu'il n'avait jamais eu de mobile sexuel à son égard.
Les experts appelés à la barre ont dépeint son "incapacité à l'empathie, à éprouver le sentiment de culpabilité, ils ont dressé un portrait terrible d'un antisocial, d'un psychopathe à la dangerosité psychiatrique et criminelle extrême. Il faudra en tenir compte", a souligné Me Crépin.
"J'ai cette terrible conviction que heureusement qu'il a été arrêté à temps et que Maëlys ne sera pas morte pour rien", a-t-il conclu.
L'accusé, assis dans son box, en chemise noire, écoute en silence.
- "Vidéos atroces" -
"Oui, vous êtes un pédophile, un prédateur sexuel. Vous avez cherché une proie, c'est ça un prédateur", l'a ensuite à son tour apostrophé Me Caroline Rémond, avocate des deux petites-cousines victimes d'agressions sexuelles, en se tournant vers lui.
Elle revient sur les "vidéos atroces" qu'il a filmées avec son téléphone alors qu'il agressait les enfants endormies. Des images qui ont glacé l'assistance et heurté la "dignité" de leurs parents.
"Aujourd'hui j'exprime leur colère de ne pas savoir pourquoi c'est arrivé et ce qui est arrivé à Maëlys", dit-elle. L'accusé lui "a enlevé la vie" et a enlevé l'"innocence" à ses petites-cousines. "Elles ne la retrouveront pas", dénonce-t-elle.
Me Martin Vatinel, l'un des avocats du père de Maëlys, demande pour sa part aux jurés de "regarder en face l'atrocité des faits". L'accusé, en détruisant les indices et en brouillant les pistes par ses mensonges répétés "nous aura imposé de ne fonctionner que par hypothèses", souligne-t-il.
Son client Joachim De Araujo a vécu un "long chemin de croix" de quatre ans et demi jusqu'au procès, une "plongée abyssale dans les ténèbres d'une mer déchaînée" lorsqu'on lui apprend au bout de six mois que les restes de sa fille ont été retrouvés dans une forêt de Chartreuse.
Le réquisitoire et la plaidoirie de la défense sont attendus jeudi.
L'accusé, déjà condamné en mai 2021 à vingt ans de prison pour le meurtre d'un jeune soldat à Chambéry, encourt la réclusion criminelle à perpétuité.
Y.Destro--PV