En crise, le français Atos espère ouvrir un nouveau chapitre jeudi
Encore une journée décisive pour le groupe informatique français Atos, en grande difficulté financière, qui doit dévoiler ses résultats du troisième trimestre jeudi matin, avant de connaître dans la foulée la décision du tribunal de commerce sur son plan de restructuration.
L'entreprise a déjà dû revoir à la baisse début septembre ses projections financières pour la période 2024-2027, après des résultats du premier semestre décevants.
Atos s'attend désormais à un chiffre d'affaires de 9,7 milliards d'euros en 2024, soit une baisse de 4% par rapport à 2023.
Et les performances du troisième trimestre ne devraient pas être brillantes non plus.
"On nous annonce des pertes de contrats un peu partout", détaille pour l'AFP Fabrice Lorioux, délégué syndical Unsa. Notamment de gros contrats comme Disney et le système de santé britannique, ajoute-t-il.
Atos a aussi perdu l'énorme contrat des Jeux olympiques, dont il a été le pilier technologique pour l'édition 2024 à Paris, le Comité international olympique lui ayant préféré l'américain Deloitte, et ce, dès les Jeux olympiques d'hiver de 2026 en Italie.
"Dans le meilleur des cas, (les résultats) seront mauvais et, dans le pire des cas, ils seront catastrophiques", résume Lionel Melka, associé-gérant chez Swann Capital.
- Des créanciers sereins -
L'ex-fleuron de la tech, dont le cours de l'action en Bourse a chuté de plus de 90% depuis le début de l'année, attend donc avec impatience la décision sur son plan de restructuration, qui doit lui permettre d'éviter le naufrage.
Ce plan, voté début septembre par les créanciers et les actionnaires, a été élaboré après l'abandon du rachat par l'actionnaire principal Onepoint.
Outre un allègement de la dette de 3 milliards d'euros, sur un total de près de 5 milliards, il prévoit une augmentation de capital et une dilution "massive" des actionnaires.
"Très sereins quant au délibéré" du tribunal de commerce de Nanterre (ouest de Paris), les créanciers souhaitent une restructuration d'ici la fin de l'année pour se concentrer enfin sur la reprise de l'activité, selon une source proche du dossier.
Une mission confiée à Philippe Salle, qui prendra les rênes d'Atos à partir du 1er février 2025 et a été nommé président du conseil d'administration entre-temps.
- Un ciel obscur -
Mais relancer la machine Atos ne sera pas de tout repos.
Le groupe aux plus de 90.000 salariés peine par exemple à s'accorder avec l'Etat sur le prix de cession de ses "activités stratégiques", qui comprennent notamment les supercalculateurs utilisés pour la dissuasion nucléaire.
En juin, l'Etat français avait fait une offre de 700 millions d'euros pour éviter que ces activités sensibles ne tombent entre les mains d'acteurs étrangers. Une proposition qui n'était pas au goût d'Atos, qui a fourni à l'Etat une offre révisée.
Le groupe et ses créanciers "veulent le juste prix", selon une source proche du dossier. Mais il n'est pas sûr qu'ils obtiennent gain de cause.
"Etant donné le discours actuel de l'Etat sur la dette, il ne risque pas d'être très généreux et Atos n'est pas en position de force vu qu'il n'y a qu'un acheteur", analyse de son côté Lionel Melka.
Les deux parties ont indiqué poursuivre les négociations.
Parallèlement, plusieurs médias affirment qu'Atos a perdu un appel d'offres pour doter l'Agence ministérielle pour l'IA de défense d'un supercalculateur dédié à l'intelligence artificielle au profit du tandem formé par l'américain Hewlett-Packard et le français Orange. Un contrat estimé à plus de 100 millions d'euros par le journal économique la Tribune.
Seule lueur dans un ciel obscur, la cession au groupe français d'ingénierie Alten de Worldgrid, filiale hautement critique qui conçoit les systèmes de pilotage des centrales nucléaires, notamment pour EDF, est toujours sur les rails.
"Le processus de cession est en cours et reste soumis aux autorisations habituelles pour ce type d'opération", a indiqué Alten à l'AFP.
La transaction, qui doit être finalisée avant la fin de l'année, devrait apporter 270 millions d'euros d'argent frais à Atos, selon plusieurs médias.
I.Saccomanno--PV