Barrage détruit en Ukraine: des bombardements touchent des évacuations de civils
Les autorités ukrainiennes et d'occupation russe se sont accusées mutuellement jeudi de frappes meurtrières dans le sud du l'Ukraine, visant des civils, dont des évacués des zones inondées par la destruction du barrage de Kakhovka.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'est rendu dans la région de Kherson, où plus de 600 km2 ont été inondés selon Kiev, pour apporter son soutien aux civils touchés. A ce stade, les autorités ukrainiennes et d'occupation russe recensent six morts dans les inondations.
Mais malgré les évacuations de civils en détresse, les bombardements se sont poursuivis.
Les autorités d'occupation russe en Ukraine ont accusé Kiev d'avoir tué deux personnes, dont une femme enceinte de 33 ans, en bombardant jeudi un point d'évacuation à Golan Pristan, où les secours installés par Moscou aident les civils à quitter les zones inondées.
Un reponsable de l'armée ukrainienne a de son côté fait état de bombardements de l'artillerie russe sur le centre de la ville de Kherson, touchée par des inondations importantes, qui ont fait plusieurs morts et blessés.
Ces bombardements surviennent alors que M. Zelensky était jeudi à Kherson pour échanger avec des responsables et des civils à un point d'évacuation.
"Vous traversez une épreuve difficile. Nous allons vous aider et reconstruire tout ce qui doit l'être (...) Je tiens à remercier l'ensemble du personnel médical pour son travail, même sous le feu. Vous êtes héroïques", a-t-il déclaré dans un message publié sur les réseaux sociaux.
Le président a dit avoir tenu une "réunion de coordination" sur "la situation opérationnelle de la région" et "l'évacuation de la population des zones potentiellement inondables".
- 20.000 personnes sans électricité -
Moscou et Kiev se rejettent la responsabilité de la destruction, mardi, du barrage Kakhovka situé sur le fleuve Dniepr, qui fait craindre une catastrophe humanitaire et écologique.
Selon le gouverneur Oleksandre Prokoudine, "six cents kilomètres carrés sont inondés dans la région de Kherson. 32% se trouvent sur la rive droite" du fleuve contrôlée par les Ukrainiens, et "68% sur la rive gauche", occupée par les Russes.
Selon l'administration de la région, 2.198 personnes ont été évacuées. De nombreuses autres personnes ont fui par leurs propres moyens.
Les services d'urgence ont expliqué que, du côté ukrainien de la rivière, "20 localités et 2.629 maisons" avaient été inondés.
Un homme de 53 ans du village de Vassylivka, qui avait refusé d'être évacué mercredi, est mort, selon Serguiï Chaikhet, chef de la police de la région de Mykolaïv.
Côté russe, 4.500 personnes "ont déjà été évacuées", selon les autorités d'occupation, et "cinq personnes (...) sont mortes noyées", selon Vladimir Leontiev, le maire de la ville de Nova Kakhovka, installé par la Russie.
Plus de 20.000 consommateurs sont toujours privés d'électricité, selon le ministère ukrainien de l'Energie.
Le gouvernement a lancé un appel aux dons pour les sauveteurs, notamment pour l'achat de bateaux ou de motopompes.
- Aide internationale -
A Kherson, Tetiana Omeltchenko, 65 ans, a expliqué à l'AFP avoir attendu les sauveteurs pendant deux jours, s'extirpant finalement de son appartement par une fenêtre pour atteindre le canot pneumatique des services locaux.
"Dans mon immeuble, l'eau a atteint le troisième étage et il y a encore des personnes là-bas", a-t-elle affirmé.
Selon une employée de l'agence météorologique locale, Laura Moussiïane, le niveau de l'eau dépasse de 5,33 mètres la normale. Mais il "a commencé à baisser un peu. Si cette tendance se poursuit, ce sera une bonne nouvelle pour les habitants", a-t-elle estimé auprès de l'AFP.
La veille, Volodymyr Zelensky avait déploré l'absence d'aide humanitaire internationale: "l'ONU, les Nations Unies et les représentants de la Croix-Rouge ne sont pas là", a-t-il dénoncé, se disant "choqué", dans une interview aux médias allemands Welt TV et Bild.
"En réponse à ces accusations", la Croix Rouge a assuré participer aux opérations d'évacuations en territoire ukrainien, avec une cinquantaine de volontaires.
Lors d'une réunion entre le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kuleba et la coordinatrice de l'ONU en Ukraine, Denise Brown, "a été convenu que les Nations unies augmenteraient immédiatement le volume de l'aide et enverraient des forces supplémentaires à Kherson et dans d'autres régions touchées", a annoncé le ministère.
Le président français Emmanuel Macron avait lui annoncé mercredi soir l'envoi d'une "aide pour répondre aux besoins immédiats".
Volodymyr Zelensky a accusé dès mardi la Russie d'avoir miné le barrage et de l'avoir fait exploser.
Son homologue russe Vladimir Poutine a pour sa part affirmé mercredi qu'il s'agissait d'"un acte barbare" commis par les Ukrainiens. Jeudi, la Russie a accusé l'Ukraine devant la Cour internationale de justice (CIJ) d'avoir attaqué le barrage avec des frappes d'artillerie "massives".
- "Dégâts environnementaux" -
Volodymyr Zelensky a aussi dit craindre "des dégâts environnementaux massifs".
"Nous risquons de perdre de nombreuses espèces de plantes et d'animaux figurant sur la liste rouge" de l'Union internationale pour la conservation de la nature, a précisé Andriï Iermak, le chef de l'administration présidentielle ukrainienne.
Un garçon de quatre ans, son père et son grand-père ont par ailleurs été tués dans une frappe russe dans la région de Donetsk (est), a annoncé la police ukrainienne sur Telegram, qui a également fait état de cinq autres blessés dont quatre enfants.
Le Kremlin a averti jeudi que l'explosion lundi d'un pipeline d'ammoniac en Ukraine, essentiel pour l'exportation des engrais, risquait d'avoir un "impact négatif" sur l'avenir de l'accord céréalier crucial pour l'approvisionnement alimentaire mondial.
Y.Destro--PV