Ukraine: des concessions à Poutine seraient "suicidaires" pour l'Europe, dit Zelensky
Toute concession sur l'Ukraine à Vladimir Poutine serait "inacceptable" pour Kiev et "suicidaire" pour l'Europe, a prévenu jeudi Volodymyr Zelensky, peu après que Moscou a intimé à l'Occident de négocier sous peine de "destruction de la population ukrainienne".
Il a également appelé Américains et Européens à être "forts" et à "valoriser" leur relation, même si l'élection de Donald Trump à la présidence des Etats-Unis fait planer l'incertitude à la fois sur les liens entre ces alliés et le soutien à l'Ukraine.
"Certains d'entre vous, ici présents, ont vivement recommandé à l'Ukraine de faire des +concessions+ à Poutine. C'est inacceptable pour l'Ukraine et suicidaire pour toute l'Europe", a lancé le président ukrainien dans un discours prononcé devant les dirigeants européens rassemblés à Budapest et dont l'AFP a obtenu une copie.
Plus de deux ans et demi après le début de son invasion de l'Ukraine, la Russie est en position de force sur le front oriental, où son armée progresse de plus en plus vite face à des troupes ukrainiennes moins nombreuses et moins bien équipées.
L'élection de Donald Trump à la présidence américaine laisse en outre craindre à l'Ukraine et aux Européens un désengagement américain dans les mois à venir.
"J'ai parlé au président Trump (...) c'était une bonne conversation productive, mais bien sûr nous ne pouvons pas dire quelles actions spécifiques il va entreprendre", a relevé le dirigeant ukrainien.
M. Zelensky a aussi rappelé que les forces du Kremlin ont également, selon Kiev et l'Occident, reçu en renfort au moins 10.000 soldats nord-coréens.
La Corée du Nord "mène désormais la guerre en Europe". "Les soldats nord-coréens tentent de tuer notre peuple sur le sol européen", a-t-il déploré.
C'est dans ce contexte difficile que Volodymyr Zelensky s'est rendu jeudi en Hongrie, pour une réunion avec des dirigeants européens. Il y a affirmé que les liens entre les Etats-Unis et l'Europe ne devaient pas être "perdus" mais "valorisés" après la victoire de Donald Trump.
- "Destruction de la population" -
Le chef du Conseil de sécurité russe et ex-ministre de la Défense, Sergueï Choïgou, avait lui opté quelques heures plus tôt pour un ton menaçant afin de pousser les Occidentaux à des négociations favorables à Moscou.
"La situation sur le théâtre des hostilités n'est pas en faveur du régime de Kiev, l'Occident a le choix : poursuivre son financement (de l'Ukraine) et la destruction de la population ukrainienne ou admettre les réalités existantes et commencer à négocier", a-t-il dit lors d'une réunion.
La question de la pérennité du soutien occidental à l'Ukraine est d'autant plus pressante pour Kiev que pendant sa campagne électorale, Donald Trump n'a cessé de dénoncer l'ampleur de l'aide à Kiev.
Avec son retour à la Maison Blanche, la balle est dans le camp américain, a estimé jeudi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.
"On verra s'il y a des propositions" de la nouvelle administration américaine, a-t-il déclaré.
- Nouvelle attaque sur Kiev -
Parallèlement, la Russie poursuit ses bombardements quotidiens de l'Ukraine, dans une volonté apparente de casser le moral de la population. Ces dernières semaines, elle a intensifié ses frappes sur les villes ukrainiennes, notamment Kiev.
La capitale a ainsi été visée par des attaques de drones six des sept jours de la première semaine de novembre et 20 jours en octobre, selon l'administration militaire.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, la défense aérienne a détruit "plus d'une trentaine" de ces appareils au-dessus de la capitale et ses banlieues, selon la même source.
Des débris de drones sont tombés sur six quartiers de Kiev, faisant deux blessés légers, selon cette source.
Jusqu'à présent, Kiev a pu résister à l'agression russe, et notamment repousser en partie ces bombardements systématiques, grâce à l'aide militaire occidentale.
Mais, depuis un an, confrontée à des forces russes plus nombreuses et mieux armées, ainsi qu'aux tergiversations occidentales grandissantes, l'armée ukrainienne recule et les pertes de territoires se sont accélérées cet automne.
Moscou réclame que l'Ukraine dépose les armes, qu'elle lui cède cinq régions, qu'elle renonce à son alliance avec l'Occident et à son ambition de rejoindre l'Otan. Des conditions inacceptables pour Kiev.
Américains et Européens assurent l'Ukraine de leur soutien indéfectible, mais refusent de l'autoriser à frapper en profondeur le territoire russe avec les armes qu'ils fournissent et d'abattre les engins russes visant les villes ukrainiennes, de crainte que cela n'entraîne une escalade.
Volodymyr Zelensky a vivement critiqué les Occidentaux, relevant que Moscou mène une escalade continue dans le conflit, la dernière en date étant le déploiement suspecté de milliers de soldats nord-coréens.
A.Graziadei--PV