Bayrou veut simplifier l'administration face à une "bureaucratie" jugée "trop lourde"
Dans la lignée du gouvernement précédent, le Premier ministre François Bayrou a martelé mardi sa volonté d'économies et de simplification des processus dans l'administration, sans en dévoiler les détails, allant jusqu'à dénoncer une "bureaucratie" jugée "trop lourde" et "incroyablement nuisible au développement du pays".
Dans les pas de son prédécesseur Michel Barnier, François Bayrou a repris à son compte un refrain bien connu contre la "bureaucratie", en prononçant face aux députés sa déclaration de politique générale. Il a dénoncé un "poids des normes qui vient pénaliser la croissance", et des contraintes qui constituent "un frein insupportable à l'activité de notre pays".
Dans la perspective d'adoption des budgets de l'Etat et de la Sécurité sociale, "il faudra trouver des méthodes d'organisation de l'Etat qui ne requerront pas d'augmentation de nos dépenses publiques. Il nous faut repenser tous nos budgets", a lancé François Bayrou, en précisant qu'il demanderait à "tous les ministres de les préparer dès le printemps".
De quoi laisser présager des économies de fonctionnement dans les administrations ?
Dans une circulaire en date du 12 novembre 2024, l'ancien Premier ministre Michel Barnier exigeait déjà la "sobriété" de son gouvernement, notamment lors des déplacements sur le terrain.
Concernant la "bureaucratie" jugée "trop lourde" par François Bayrou, "c'est une arlésienne de ces dernières années, reprise sans trop dire ce qu'on va débureaucratiser", estime Johan Theuret, du cercle de réflexion de hauts fonctionnaires "le Sens du service public", qui juge l'expression "stigmatisante".
"Il y a toujours cette idée de vouloir mettre en cause le rôle des dépenses de fonctionnement de l'administration et du service public dans le déficit, alors qu'il est d'abord et avant tout le fruit de choix fiscaux. C'est ce que dit la Cour des comptes, avec une perte de recettes fiscales de 62 milliards d'euros depuis 2018", assure-t-il.
- Réforme de l'Etat -
Toujours dans les traces de son prédécesseur, François Bayrou a aussi pointé le rôle de certaines agences et certains organes ou opérateurs de l'Etat.
"Est-il nécessaire que plus de 1.000 agences, organes ou opérateurs exercent l'action publique?", a-t-il interrogé. "Nous connaissons le rôle précieux de plusieurs d'entre eux, comme France Travail. Mais ces 1.000 agences ou organes, sans contrôle démocratique réel, constituent un labyrinthe dont un pays rigoureux peut difficilement se satisfaire", a-t-il poursuivi.
Sous l'autorité de Michel Barnier, qui plaidait aussi pour la réduction du nombre d'agences et de comités de l'Etat dans le but de réaliser des économies, l'ancien ministre de la Fonction publique, Guillaume Kasbarian, avait identifié "plusieurs dizaines" de ces "comités Théodules" dans l'objectif de les supprimer.
Disant vouloir engager un "puissant mouvement de réforme de l'action publique", François Bayrou a indiqué qu'il associerait les parlementaires à cet "effort d'organisation et de rationalisation", sans donner plus de détails sur sa feuille de route.
Sur du plus long terme, le Premier ministre a également annoncé la création d'un fonds dédié à la réforme de l'Etat, qui sera notamment financé par des ventes d'actifs immobiliers de la puissance publique.
Les sommes dégagées "ne pourront pas être utilisées pour des dépenses courantes, pour abonder tel ou tel budget. Elles resteront donc uniquement consacrées à ces efforts de réorganisation", a détaillé M. Bayrou, en investissant par exemple dans le développement de l'intelligence artificielle dans les services publiques.
"On sera très attentif. Si c'est améliorer le fonctionnement et simplifier, ça peut se faire intelligemment, en écoutant les agents par exemple", assure Mylène Jacquot, secrétaire générale de la CFDT Fonction publique, qui espère désormais que le discours s'accompagne d'actes.
Soulignant que l'effort financier demandé aux collectivités sera ramené de 5 milliards d'euros initialement à 2,2 milliards d'euros en 2025, le Premier ministre a évoqué la possibilité d'associer les "acteurs de terrain" aux "simplifications, suppression et allègement d'obligations utiles".
Un point "à creuser", juge Johan Theuret, qui souligne l'abondance de la littérature en matière de proposition de simplification dans l'administration, notamment les collectivités. "Mais ça reste encore flou dans le message du Premier ministre", nuance-t-il.
O.Mucciarone--PV