"Syndrome aérotoxique": l'Anses encourage à approfondir les recherches
L'air des avions est-il toxique? L'Agence de sécurité sanitaire (Anses) a rendu un avis nuancé mercredi, estimant que des recherches plus approfondies étaient nécessaires pour établir un éventuel lien avec des symptômes rapportés par des personnels navigants.
L'agence a été saisie en 2019 par plusieurs syndicats représentant pilotes et personnels de cabine, ainsi que par l'Association des victimes du syndrome aérotoxique (AVSA).
Cette dernière, qui souhaite se joindre en tant que partie civile à une information judiciaire ouverte à Paris pour "blessures involontaires" et "mise en danger de la vie d'autrui", décrit une "contamination aiguë ou chronique de l'air pressurisé des avions par des substances toxiques".
Elle assure que "sur la quasi-totalité des avions de ligne, l'air respiré à bord est prélevé sur les réacteurs. Cet air est contaminé, entre autres, par l'huile utilisée pour leur lubrification", qui contient, toujours selon l'AVSA, des "additifs toxiques", tandis qu'une partie des contaminants est de taille "nanométrique".
Entre autres symptômes: maux de tête, vertiges, problèmes digestifs et respiratoires...
L'information judiciaire, instruite au pôle santé publique de Paris, a été ouverte après le dépôt de plainte d'un pilote d'easyJet en 2016.
Le comité d'experts cité dans le rapport de l'Anses convient que "de nombreux polluants gazeux et particulaires (...) sont présents dans les cabines d'avions, mais juge que "les données sont insuffisantes pour conduire une évaluation quantitative des risques sanitaires" liés à cette situation.
Pour l'Anses, il existe "un niveau de preuve faible à la désignation d'un syndrome spécifiquement lié à l'exposition à divers polluants ou produits de décompositions moteurs ou de fluides hydrauliques".
"Si les symptômes décrits par les personnes ne sont pas mis en cause, l'agence souligne que le +syndrome aérotoxique+ n'est pas à ce jour une entité nosologique consensuelle" et "encourage les études qui permettront d'apporter des connaissances sur les causes d'événements de contamination de l'air des cabines et leurs conséquences sur la santé des personnels navigants", dont plusieurs sont en cours.
"C'est une étude sur pièces", a regretté Me Béryl Brown, avocate de l'AVSA et d'un pilote, qui "s'interroge sur la portée d'un tel rapport".
"C'est un petit peu décevant. Tant que l'on ne fait pas de prélèvements et de collectes de données sur l'humain et le matériel, on pourra continuer à empiler des dossiers", a-t-elle ajouté.
L'Anses a étendu le champ de son rapport aux "effets sur la santé liés à la profession de personnel navigant" et rappelé que des études avaient déjà conclu que ces employés étaient plus souvent touchés que la moyenne de la population par des cancers de la peau et des leucémies, possiblement liés aux rayonnements solaire et cosmique.
A.Rispoli--PV