Japon/Football: les lycéens japonais ont leur "Mondial"
Le tournoi national des lycées est considéré comme le summum du football amateur au Japon, remplissant les stades, attirant des millions de téléspectateurs et faisant éclore les futures stars du ballon rond nippon.
Samedi 28 décembre dans le stade olympique de Tokyo, près de 20.000 jeunes supporteurs agitent frénétiquement des drapeaux, frappent des tambours et chantent dans un spectacle bruyant et coloré.
Cette agitation n'est pas pour un concert de K-Pop. Mais pour le match d'ouverture du 103e tournoi national des lycées, compétition créée en 1917, bien avant l'arrivée du football professionnel dans l'archipel, en 1993 avec la création de la J-League.
Quarante-huit équipes, dont deux de Tokyo, représentant les 47 départements du Japon s'affrontent autour du Jour de l'An dans une compétition à élimination directe sur 17 jours avec des matches joués dans et autour de la capitale.
Tous les matches sont télévisés localement et la finale, jouée le 13 janvier, et les demi-finales sont diffusées sur les chaînes nationales et regroupent des millions de téléspectateurs.
La finale de l'édition 2024 s'est jouée devant 55.000 spectateurs, affluence largement supérieure à la plupart des matches de la J-League.
"Toutes les équipes ont un niveau technique similaire, donc il s'agit de savoir qui veut le plus gagner", explique pour l'AFP Junpei Fukuda, 18 ans, le responsable des supporteurs du Lycée Kashiwa, représentant le département de Chiba, au nord-est de Tokyo.
"Nous voulons que nos voix soient les plus fortes" pour aider l'équipe, glisse-t-il, tout à sa joie.
- Lycée contre centre de formation -
Contrairement à l'Europe, où les jeunes pépites sont essentiellement recrutées via les centres de formation des clubs pros, les lycées attirent encore les meilleurs talents locaux, comme les stars japonaises actuelles Daizen Maeda, Reo Hatate et Daichi Kamada.
Ce tournoi est "la compétition que je rêve de jouer depuis que je suis petit", explique Kanaru Matsumoto, le milieu de terrain de Ryutsukeizai Kashiwa, qui deviendra professionnel la saison prochaine avec Shonan Bellmare, club de J. League.
"La principale raison pour laquelle je suis venu dans cette école, c'est parce que j'espérais pouvoir disputer ce Tournoi", ajoute le jeune homme de 17 ans.
Récemment, le football professionnel japonais s'est structuré autour de son championnat élite et les clubs commencent aussi à recruter les jeunes pour leur centre de formation. Ainsi l'équipe nationale des U18 compte dorénavant autant des joueurs issus des lycées que des clubs pros.
- Fierté locale -
Mais qu'importe si la voie vers le professionnalisme passe de plus en plus par les clubs. Le succès de ce tournoi est aussi ailleurs.
Le journaliste spécialisé dans le football Masashi Tsuchiya explique que l'une des raisons de cet engouement vient du fait que le sport scolaire touche une corde sensible au Japon.
"Je suis originaire de la préfecture de Gunma et je soutiens toujours l'équipe de Gunma, même si ce n'est pas l'équipe de mon ancien lycée", déclare-t-il.
"C'est un tournoi qui met en avant la fierté locale et les liens avec les anciens établissements".
L'entraîneur du Lycée Ryutsukeizai Kashiwa, Masahiro Enomoto, met également en avant la transition entre le lycée et l'université, après trois ans passés ensemble en tant qu'équipe.
"C'est là que les enfants, qui ont travaillé très dur pour quelque chose, deviennent adultes", affirme-t-il.
"Et les Japonais viennent aussi pour les scénarios parfois dramatiques des matches avec les larmes des éliminés, plus qu'ils ne pensent à la qualité du football", déclare l'entraîneur.
D'ailleurs, selon le journaliste Tsuchiya, le football au lycée ne devrait pas être considéré uniquement comme un tremplin vers les clubs pros.
"Certes, vous pouvez le regarder pour la qualité du football et celle des joueurs. Mais vous pouvez aussi simplement apprécier de voir les jeunes donner tout ce qu'ils ont pour essayer de gagner chaque match."
O.Merendino--PV